L'AUTRE QUOTIDIEN

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Où est Jalal ?

La France porte une grande part de responsabilité dans le sort de Jalal Adaem, un réfugié soudanais du Darfour qu’elle a expulsé et renvoyé dans son pays en sachant qu’il y courait de grands dangers s’il tombait entre les mains de la milice du général Hemetti (ce titre d’un article du Monde de juin 2019 à son sujet : “Au Soudan, « Hemetti », le général sanglant qui voulait être roi”, suffit à dire qu’on n’ignorait pas dans notre pays la réputation de celui qui a orchestré la répression violente de l’opposition à Khartoum, après avoir fait ses armes dans le nord du Darfour avec les Janjaweed, connus pour terroriser les populations non-arabes de la région). Remis à la police soudanaise le 30 novembre, s’il est bien sorti libre de l’aéroport, il aurait été arrêté sur la route du Darfour par les milices du général Hemetti. Nous sommes sans nouvelles de lui depuis début décembre. Le gouvernement français serait bien inspiré de s’inquiéter ce qu’il est devenu. Il ne peut en aucun cas s’en laver les mains.

On n'a aucune information sur le sort de Jalal, maintenant prisonnier au Soudan. Même si on pense à lui tous les jours, on ne sait pas s'il est dans une cellule ou dans une fosse commune. Personne ne sait si Jalal est mort sous la torture ou s'il est encore vivant malgré ses blessures. Il n'y a aucune info. Rien à raconter depuis la déportation de Jalal à Khartoum, le 29 novembre 2019, menotté dans la nuit à Rennes pour être traîné de force dans un fourgon banalisé du CRA jusqu'à l'aéroport de Roissy, les mains attachées entre deux policiers français dans l'avion pour Istanbul, puis encore menotté dans l'avion d'Istanbul à Khartoum où il a été remis à la police soudanaise. Rien d'autre à raconter. On ne sait rien. Personne ici ne sait rien. Là-bas non plus. Jalal a disparu. Il est sorti libre de l'aéroport de Khartoum le 30 novembre. C'est déjà ça. Libre d'aller où il voulait dans un pays qui venait de jeter le dictateur al Bachir en prison. On sait seulement que Jalal a pris la route pour rejoindre le Darfour, parce qu'il a appris que sa mère était encore en vie. Après on ne sait pas pourquoi Jalal a été arrêté sur la route, par la milice de Hemiti. Au parloir du CRA de Rennes, il avait supplié qu'on le sauve des milices de Hemiti. Il est entre leurs mains, entre la vie et la mort au Soudan, dans une prison de Khartoum. Le reste on ne sait pas. Aucune nouvelle. Vraiment pas de quoi faire un article ou un sujet pour la radio, et c'est de ça dont je voudrais parler. L'absence d'infos. Le trou noir où est Jalal aujourd'hui. La façon dont Jalal a été extirpé de nos vies, expulsé de force du Centre de Rétention Administrative où il avait été enfermé, avant d'être envoyé à la mort par décision préfectorale.

Tieri Briet, le 29 janvier 2020

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