Du refus de l'instrumentalisation de l'émotion collective, par Nathalie Athina
Paris, 15 Avril 2019, un monument part en fumée...
Une cathédrale, un lieu de culte, mais aussi pour beaucoup d'entre nous, un symbole de notre enfance, Victor Hugo en sait quelque chose.
Alors oui, on est forcément et indiscutablement touché au coeur, une perche qui s'effondre sous nos yeux ébahis, ça fait " tout drôle".
Le vacarme assourdissant qui s'élève à ce moment là, dans l'étrange immédiateté de l'information d'une époque virtualisée à l'excès, suscite en moi l'envie de me recroqueviller, de faire le vide, et de réfléchir à ce qui me remue, me heurte peut être...
Tout à coup, vers 19 heures, les réseaux s'affolent, les réactions s'affichent par centaines, milliers, dizaines de milliers, et l'unanime émotion s'exprime différemment selon chacun.
Dérision, humour, noir parfois, tristesse, exaltation, nostalgie, colère, c'est, à chaque fois qu'un événement ( accident, ou drame) se produit, la même succession de questions qui se posent : "Mais non? Comment ça ? Impossible! Et pourquoi? "
Quoi de plus légitime au fond ?
Nous sommes des hommes, des femmes, des humains quoi, et tout ce qui touche, inconsciemment à notre mémoire collective, et qui subitement est touché dans son intégrité matérielle, nous ramène à notre " finitude" .
Nous sommes mortels, tout simplement et tout l'est...
Ce qui est arrivé hier n'est certes, pas le seul événement de la sorte, qui toucha directement à notre conscience collective.
Il y en a eu d'autres, et il y en aura d'autres...
Il nous revient soudain en mémoire, la destruction de la ville d'Alep, en Syrie, qui vit partir en cendres des monuments historiques datant de plusieurs siècles...
Il nous revient aussi ( parce que cela nous touche de près) les multiples attaques au cours des siècles, et autres catastrophes naturelles, contre le Parthénon, en Grèce.
Le même Parthénon qui demain se retrouvera sans doute "privatisé" par des actionnaires allemands.
Et tellement d'autres...
Alors oui, nous avons le droit, et c'est sans doute incontournable, de nous émouvoir.
Mais voilà, comme le disait feu ma grand mère ( elle était sage ma grand mère), il faut, de toute chose, mesure garder.
Quand les choses sont arrivées, la seule issue que nous ayons, est de regarder devant nous et de reprendre nos esprits.
Qu'est il arrivé finalement?
Nous avons perdu un symbole.
Il sera reconstruit.
Car de l'argent, il y en a.... dans les caisses du Capital ( toute ressemblance avec un célèbre slogan n'est pas fortuite )
Et loin de moi l'idée de vouloir instrumentaliser l'émotion, loin loin de là oui.
Profiter d'un moment pareil, pour faire culpabiliser me semble relever de la malhonnêteté intellectuelle, alors je ferai de mon mieux pour exprimer ce que je ressens là, sans filtre mais sans langue de bois.
Souvenons nous à cet instant, si vous le voulez bien, de ces milliers d'hommes et femmes, ces ouvriers, ces ouvrières, morts pour avoir participé à la construction de ce magnifique édifice, et de tous les autres.
Rappelons nous si vous le voulez bien, comment partout dans le monde, des guerres, provoquées par ce système libéral, et au nom du pouvoir, qui détruisent non seulement notre patrimoine historique mondial, mais avant tout, des vies, des VIES.
Nous devrions, plus que jamais, faire la part des choses. Et nous souvenir que nous ne maîtrisons pas les éléments, mais qu'en revanche, nous devons reprendre le contrôle de nos vies, individuellement, et collectivement.
Que l'émotion que suscitera, à chaque fois, une atteinte à notre mémoire collective, ne doit pas effacer d'un revers de la main, tout le reste...
Comprenons-nous bien. Il est hors de question d'établir un parallèle entre un tel accident, et notre soif de justice, notre soif de paix, et d'égalité sociale.
Cela n'aurait pas de sens.
Il me semble plutôt essentiel de ne pas nous perdre émotionnellement, à un moment de notre histoire sociale, ou le peuple qui souffre, a su se rassembler pour exprimer cela, et provoquer une vague proche d'une insurrection, qui fait trembler le gouvernement, quoiqu'il dise.
Et puis, les millions pleuvent si vite n'est ce pas?
On voit bien quelles sont les priorités pour cette classe oligarchique, n'est ce pas?
Reprenons Notre Dame, comme le haut lieu du sacrifice de tous ces hommes morts pour qu'elle vive.
Reprenons nos vies, comme le plus haut lieu de culte de cette valeur essentielle, la Liberté.
Nathalie Athina, le 16 avril 2019
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