Puis quand vient l’automne brumeuse, par Arnaud Maïsetti
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Puis on approche de ces heures qui tombent comme de la neige même quand la neige ici ne tombe que dans les souvenirs qu’on n’a plus : c’est l’heure incertaine de ces jours.
Rien de certain, non, pas même la brume qu’on voit : qui monte ou descend, comment le savoir, il faudrait être au milieu de la brume, et c’est toujours quand on vient vers elle qu’elle recule, ou soudain se déchire.
Oui, dans l’époque incertaine où on est, il faudra être à la fois ce qui déchire et ce qui renoue, et on est déjà, chacun où nous sommes, la déchirure et le renouement : le travail de ces jours, c’est de savoir où, et quand, nous sommes : et aller, dans la déchirure déchirer encore, et dans le renouement : consoler peut-être.
Soir de vote en Allemagne ; les néo-nazis fêtent leur victoire (celle d’exister), les conservateurs fêtent leur victoire (celle de gouverner encore), les réformistes fêtent leur victoire (celle d’avoir évité la défaite) – et les révolutionnaires dans les cafés sombres jusqu’au matin comploteront contre le monde, en silence, terribles et déterminés : pensées adressées au soir, et au matin.
Non, c’en est fini de se préparer : à marcher dans la brume sur Marseille dans la fin du jour, c’était encore la pensée : dans l’époque incertaine, chaque pas lève les masques et quand on pénètre dans la brume, c’est la brume qui se dissipe. C’en est fini des imminences : des silences dans les cafés le soir.
Cette nuit, le collectif « Staub zu Glitzer (« de la poussière aux paillettes ») occupe la Volksbühne comme on occupe le terrain. Une banderole : "Doch, Kunst" : "et donc, l’art". Je lis Thomas Bernhard, comme on avance dans la brume incertaine de l’époque, avec pour la fendre le désir de crier de toutes ses forces.
Arnaud Maïsetti, le 24 septembre 2017
Arnaud Maïsetti vit et écrit entre Paris et Marseille, où il enseigne le théâtre à l'université d'Aix-Marseille. Vous pouvez le retrouver sur son site Arnaud Maïsetti | Carnets, Facebook et Twitter@amaisetti.