Postface du 20 juin 2017
Je recherche des noyades qui s’enchaînent et se combinent jusqu’au paroxysme. Couler à pic dans des flots de Dom Pérignon ne me suffit pas. Je pose Ulysse sur la moquette et l’ouvre au hasard, je relève mes cheveux en chignon pour me préparer au plongeon. C’est entre les jambes de Molly Bloom que je veux atterrir. Avec mes lèvres, je tourne les dernières pages, mélange ma salive au grand fleuve de mots que lâche Molly Bloom. Je demande l’hospitalité à Joyce. Pour m’allonger entre ses mots, je dois trouver l’endroit où me glisser. Là où le monologue de Molly tourne fou, là où il piétine Dieu, j’ai une chance de m’infiltrer. Après le mot « chien », je tente de passer mon corps en contrebande mais je suis rejetée. Avant de relire la phrase, je l’embrasse en fermant les yeux, déposant un baiser blond sur chaque mot, ça vaudrait mieux qu’il me le mette dedans par derrière comme Mme Mastiansky me racontait que son mari lui faisait faire comme les chiens et de tirer la langue tant qu’elle pouvait. La fabuleuse orgie de mots sans ponctuation m’a avalée. Un tambourinement timide contre la porte d’entrée. Comment expliquer à Milton Greene que Marilyn ne peut s’extraire de la bouche de Molly Bloom qui crache des bans de mots aquatiques ? Comment lui dire que Marilyn est vingt mille lieues sous la ligne des flots écumeux du champagne ? Comment éviter que mon sexe crie « daddy, daddy » alors que mes lèvres sont cadenassées infibulation orthobuccale ?
Marilyn naissance année zéro de Véronique Bergen, éditions Al Dante