L'AUTRE QUOTIDIEN

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Un Comité d'Action Inter-lycéen appelle à la grève contre la sélection et son monde

Ca y est, APB c’est fini. Ca y est, APB va être remplacé. Fin du tirage au sort, mise en place de la sélection à l’entrée de l’université. Le système est mort, vive le système !

Aujourd’hui, en France, chaque bachelier a une place à l’université - quels que soient ses résultats scolaires. Chaque lycéen bachelier peut accéder à la filière de son choix, au-delà de toute considération sociale ou économique. Cela est la règle, mais les faits sont autres. Le nombre d’étudiants augmente chaque année - choc démographique des années 2000 - et la plupart des facs sont très largement surchargées, et de plus en plus de filières sont dites « en tension », c’est-à-dire que le nombre de voeux est supérieur au nombre de places. Cette situation mène à une mise en concurrence des lycéens et des étudiants pour accéder à la filière souhaitée ou pour y rester. Depuis trop longtemps les prémisses d’une sélection insidieuse sont donc déjà bien là. Or, Macron franchit maintenant un nouveau cap, considérable. Ce dernier veut, dès la rentrée prochaine, remplacer APB par un système de sélection réelle et assumée. Cela veut dire que, dès juin prochain, tous les bacheliers n’auront plus de place assurée à l’université. Les lycéens seront officiellement mis en concurrence et sélectionnés ou pas dans les filières demandées en fonction de leurs résultats scolaires, les facs auront accès aux bulletins et à l'avis unique de chaque prof. Le but étant de décharger les facs en envoyant plus de lycéens vers des filières technologiques ou professionnelles après le bac. Que vont donc devenir ceux qui n’auront pas été sélectionnés ?

Si tout le monde comprend ce que signifie sélection, il faut comprendre ce qu’elle induit - ou plutôt ce qu’elle ignore. Si le tirage au sort était arbitraire, la sélection entend être la solution en camouflant les réalités du système scolaire français dont elle est l’incarnation. L’incarnation d’un système méritocratique qui, par la mise en concurrence des élèves, efface les possibles solidarités entre ceux-ci. Autrement dit, un système qui ne réfléchit pas à ses faiblesses - qu’elles résident dans un certain déterminisme social, ou une reproduction des inégalités en milieu scolaire - et trouve comme issue pour sa survie de donner une valeur supplémentaire aux élèves. La sélection n’est que l’incarnation d’un système en fin de vie, essoufflé et essayant de recycler les mêmes réformes depuis 50 ans afin de se donner une consistance, de survivre. Au-delà de la sélection, c’est donc la survie et la signification de tout un système scolaire qui est ici remise en cause. À nous d’affirmer le système scolaire que nous voulons - ou plutôt de s’opposer à la poursuite de la libéralisation de l’école, et de l’affirmation de l’école et de la fac comme lieu de compétition capitaliste et de hiérarchisation sans questionnement social ni humain.

Depuis plus de 50 ans les gouvernements successifs veulent instaurer cette sélection, et ont toujours échoué face aux contestations massives. Alors, pourquoi réessayer aujourd’hui ? Macron profite de la faillite programmée d’APB pour justifier une mesure qui jamais ne serait acceptée en d’autres temps. Depuis près de quinze ans, tout le monde est au courant du choc démographique des années 2000 (environ 40.000 nouveaux bacheliers chaque année), or jamais les moyens ni les places des facs n'ont réellement été augmentés. Il est donc prévu depuis un moment que tout le monde n’aura pas sa place à l’université, et ce seraient les générations 2000 qui s’en feraient les cobayes. Ainsi, si la « crise d’APB » était prévue - et n’a pas été devancée - c’est bien pour justifier la sélection en espérant peu d’opposition. Ici la solution n’est surtout pas dans le tirage au sort ou la sélection, mais bien dans les moyens que l’on décide d’allouer aux universités. Au-delà du retrait de la loi Vidal, nous réclamons donc que chaque bachelier puisse accéder à la licence de son choix dans la fac de son choix - soit simplement libre d'étudier comme il le veut et non comme il le peut, selon des critères élitistes et socialement injustes.

Et, puisque la sélection ne suffit pas, Macron enchaîne une série de réformes contre la jeunesse - réforme complète de l’enseignement supérieur, baisse des APL et mise en plaise d’un service militaire obligatoire dès 2019 pour les 18 à 21 ans. Il est donc à nous de manifester notre opposition à ces réformes régressives et rétrogrades qui furent toujours abandonnées ou abolies, mais surtout de proposer une autre diagonale par laquelle la jeunesse peut échapper à cet avenir pré-sélectionné. 

Nous appelons ainsi toutes les franges de la jeunesse, des lycéen.ne.s aux étudiant.e.s à faire grève et bloquer leur établissement afin de libérer du temps, mais surtout de faire pression en bloquant le lieu central de la conflictualité (le lycée, la fac) entre les élèves et le gouvernement quant à la sélection - et ainsi renverser le rapport de force. Nous appelons donc les lycéen.ne.s et les étudiant.e.s:

- à faire grève et bloquer leur établissement le mercredi 22 novembre, jour de l'examen du projet de loi Vidal en conseil des ministres.
- à rejoindre la manifestation du même jour, place de la République à 13h jusqu'à la place de la Bastille.

Le Comité d'Action Inter-lycéen

Le spectre qui fait encore trembler les gouvernements - manifestation contre la loi Devaquet de "réforme des universités", novembre 1986