L'AUTRE QUOTIDIEN

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Procès du quai de Valmy : une justice qui se veut "exemplaire" est une parodie de justice !

Le verdict du procès des événements qui se sont conclus par l'incendie d'un véhicule de police sur le quai de Valmy, en marge d'un rassemblement de policiers, le 18 mai 2016 est tombé hier. Deux inculpés ont été relaxés, l'un est condamné à un an de prison avec sursis, les autres écopent de peines de un an à sept ans de prison ferme. Le procès aura révélé à quel point l'état de droit est mal en point.

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Au terme d'un procès sous haute tension, les peines prononcées sont lourdes. Neuf personnes étaient jugées à Paris du 19 au 23 septembre dernier, accusées d'avoir participé à l'attaque de policiers  et à l'incendie d'une voiture de police. Des neuf personnes jugées , cinq ont été condamnées à de la prison ferme. Angel B. et Bryan M. sont relaxés, l'instruction n'ayant pas pu permettre d'établir qu'ils étaient sur les lieux. En revanche, Leandro L. a été condamné à un an de prison, Thomas R. à deux ans de prison dont un avec sursis, Kara B. à quatre ans dont deux ans avec sursis. Ari R. et Nicolas F. écopent pour leur part de cinq ans de prison, dont deux et six mois avec sursis, tandis que Antonin B. prend cinq ans, dont deux ans avec sursis et Joachim L. de sept ans, un mandat d'arrêt ayant été requis contre lui, alors qu'il st réfugié en Suisse. Six des neuf prévenus ont été condamnés à verser solidairement 5000 euros de dommages et intérêts au très droitier syndicat policier Alliance, qui s'était porté partie civile. 

Le procès s'est tenu au terme d'une hystérie médiatique alimentée par des figures politiques comme Manuel Valls, qui avait réclamé des "sanctions implacables" et des policiers qui demandaient un "signal fort". Les images de la voiture incendiée ont été largement reprises par les médias mais sans restituer leur contexte. Ce 18 mai 2016, en pleine contestation contre la loi El Khomri, marquée par les violences policières, plusieurs syndicats de policiers appellent à descendre dans la rue, hors service et en civil. Ils appellent à un rassemblement place de la République, lieu éminemment symbolique, occupé depuis la fin mars par le mouvement Nuit debout. Il s'agit d'une provocation parfaitement calculée par le syndicat Alliance. Ce 18 mai 2016, Le Monde écrit d'ailleurs : "les policiers veulent avoir les coudées franches pour faire face aux « casseurs et demandent plus de fermeté dans les dispositifs de maintien de l’ordre". 

Les policiers manifesteront à midi ce jour là en présence de Marion Maréchal Le Pen et de Gilbert Collard, les deux députés du FN, avec qui ils multiplieront les selfies. Une contre-manifestation prévue en fin de matinée, mais interdite par la préfecture, est copieusement gazée et dispersée. Elle reflue alors vers le Canal Saint-Marti, suite à un mouvement de panique. C'est là, qu'une voiture de police est prise à partie par des contre-manifestants. Tandis que l'un tape sur le véhicule policier à coup de barres de fer, qu'un autre jette un plot sur le pare-brise, un troisième lance un fumigène dans la voiture qui prend feu. Les deux membres des forces de l'ordre qui sont à bord -une gardienne de la paix et un adjoint de sécurité- s'extirpent du véhicule sans dommage, mais l'un d'eux est attaqué par un homme qui tente de lui porter des coups de barre de fer. Tandis que les images filmées à cette occasion commencent à tourner, une enquête pour tentative d'homicide volontaire est rapidement ouverte par le Parquet de Paris et cinq personnes sont arrêtées. Tous sont des militants anti-fascistes, qui ne se connaissaient pas auparavant, ce qui est d'ailleurs leur seul point commun et qui orientera ostensiblement le cours du procès. 

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On apprendra plus tard, alors que l'accusation d'homicide volontaire est abandonnée par les juges, que les deux policiers n'ont jamais été en danger de mort. le préjudice matériel s'élève à 6100 euros. La gardienne de la paix a écopé de quatre jours d'ITT et l'adjointe dé sécurité qui l'accompagnait de dix, finalement réévalués à 30 jours, pour des séquelles psychologiques. Trois des personnes présentées au tribunal l'ont été pour pour « participation à un groupement en vue de la préparation de violence volontaire ». Un délit inséré dans le droit sous Nicolas Sarkozy et qui permet d'attaquer en justice des personnes pour le simple fait qu'elles étaient présentes lors d'un rassemblement lors duquel des violences ont été commises. Les six autres accusés étaient poursuivies pour violences. Deux d'entre eux, Kara B. et Nicolas F.,  avaient reconnu des violences, l'un avait attaqué à coup de barre de fer, l'autre ayant reconnu avoir jeté un plot sur la lunette arrière, sans réussir à la briser. 

Mais ce qui choque le plus dans la parodie de procès qui s'est déroulé à Paris en septembre, c'est que des personnes, qui ont été jugées sur la base d'un dossier mal étayé, aient pu être condamnées à de la prison ferme. Pire, le principal élément du dossier est un témoignage anonyme, celui du témoin n° 142, dont on apprendra plus tard qu'il est un policier membre du renseignement. Celui-ci ne s'est non seulement jamais présenté à la barre, mais en plus il a « refusé de répondre à toutes les questions de la défense » lors des confrontations. sasn parler des incohérences de ce témoignage sous X. une fois le coup de filet effectué dans les milieux antifascistes parisiens, il aura suffi aux policiers de réunir des éléments à charge, fragiles au demeurant. Qui ont conduit le tribunal à juger sur un "cumul de détails", relève le Monde, les juges parlant de "faisceau d'indices", à défaut de preuves indiscutables.

Le cas emblématique d'Antonin Bernanos

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Le cas d'Antonin Bernanos, arrière petit-fils de l'écrivain, qui depuis le début affirme qu'il n'était pas présent sur les lieux au moment de l'attaque, est emblématique d'un procès que le président du tribunal a transformé en procès de "l'ultra gauche" et des antifas, qu'il accuse, dans un curieux renversement, d'être des "fascistes". Le tribunal a longuement glosé sur... la couleur de son caleçon, rose selon les images, violet selon l'accusé. Un effet de lumière, selon la Cour. Le tribunal s'est donc acharné -là encore quel renversement de la procédure et quelle négation de la présomption d'innocence-, à démontrer que rien ne prouvait qu'il n'était pas l'auteur des faits qu'on lui reproche : des coups de pieds et de poings à l'un des deux policiers. Militant antifasciste assumé, Antonin Bernanos, étudiant à Nanterre, qui a passé dix mois en préventive, fait un coupable idéal. Tout comme les autres, jugés bien plus pour leurs opinions que pour des faits. Le Front social, qui est en pointe sur la contestation de la réforme du Code du travail ne s'y est pas trompé, qui a apporté son soutien aux accusés, aux côtés de nombreuses forces politiques de gauche. Car la criminalisation des militants politiques et syndicaux est une tendance lourde. En revanche, on risque d'attendre longtemps le procès des violences policières commises pendant la loi travail. Pas même une commission d'enquête parlementaire, à vrai dire.

Véronique Valentino