Le plus beau des courages, par Candice Nguyen
_envie folle de chaleur
et de la baie
de nuit
surtout de nuit
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_alors que les corps s’amoncellent et que nous finirons tous par danser pieds nus sur les cadavres (et bientôt sous) au lieu d’avoir eu la sagesse des rochers, je me demande comment donne-t-on naissance en deux mil seize en europe et ailleurs, ce qu’on se dit tard à la nuit pour se rassurer et quels mots bidons on peut trouver pour consoler les enfants, pas assez grands encore pour tout leur dire, déjà trop grands pour tout cacher; des guerres, des massacres, des haines de tout temps il y en a eu (ainsi résume à la perfection la Teen girl AI et sa mise à mort par microsoft en moins de 24h – pas vraiment un fail là, sinon un épiphénomène saisissant de ce que l’humanité présente de plus beau sous la moulinette des algorithmes, ainsi par ce prisme se résume également mon histoire familiale, éclatée, expatriée, aux quatre vents, et comment j’ai pris vie sur cette Terre en France et non pas au Vietnam – mes parents ayant fui leur pays en guerre à la fin des années soixante), non, la nausée permanente vient ici de cette pornographie permise par les flux d’information et qui s’intensifie sous le joug de ce que chacun y rajoute son petit grain de sel, comment te dire cher utilisateur des réseaux sociaux que ton avis dégoulinant et tes partages incessants de la parole institutionnalisée on s’en carre : je me torche avec.
_il y a fort heureusement la dernière newsletter d’ARTE Radio qui commence ainsi :
« Meurtries,
Épouvantés,
On est dans la mouise, les enfants, et elle monte. Je voudrais bien vous chatouiller le moral mais je préfère vous dire la vérité : ça ne va pas s’améliorer. Vous vous en doutez bien. Amateurs de Mad Max et de films de zombies, nous serons bientôt comblés. »
et puis les derniers mots d’arn. dans Nuit & Jour
« nous sommes la haine des frontières de toutes sortes et avant tout, celles qui se dressent dans un seul homme, celles qui se lèvent entre l’éclat et la souffle de la bombe. Nous sommes la conjuration de l’Histoire.
Nous nous disons : nous sommes la force d’être contre l’Histoire.
Nous sommes seuls par millions ce soir. »
_je me demande aussi si sous Giscard d’Estaing ou n’importe quel autre président, une frange immense de la population (enfin ma fausse naïveté aime à imaginer qu’elle est immense) se sentait heurtée de toutes parts — pour ma part jusqu’au viol — avec ce torchis détestable qui nous sert de gouvernement et que nous avons élu (ha ha), et si une frange (beaucoup plus petite cette fois-ci je suis prête à l’accorder) de cette même population ne rêvait pas de tout brûler, toutes ces institutions moisies et ces république et démocratie qui n’en portent plus que le nom.
(ainsi par ce billet écrit à la va-vite candice fit son coming out)
_la baie
de nuit
surtout de nuit
Candice NGUYEN
Notre chroniqueuse de l'ailleurs Candice Nguyen a quitté Paris sur un coup de tête pour Marseille où elle vit et travaille depuis 2008 dans l’éditorial et la communication digitale. Partage son temps entre la mer, les routes et l’aide à la diffusion d’artistes, à travers notamment la revue de photographie et d’arts PLATEFORM Magazine et son journal en ligne. Elle est en charge des chroniques pour L'Autre Quotidien.